Pour une Géopolitique des symboles
Nous analysons plus souvent ce que nous ne voyons pas à ce que nous apercevons. Nos cœurs palpitent au rythme des négociations arcanes mais dans cet océan de conjectures, nous oublions d’analyser ce qui est manifeste : les symboles. A l’aube de l’ère technologique, les symboles distillent des messages clairs émis par les Etats, ONG, FMN, Organisation supranationales, …
Le climat aujourd’hui est pacifiste. Mais la multiplication des Etats, la hausse des prix des matières premières, l’accélération des échanges … substituent aux rares revendications de territoires immenses une multitude de petits « points chauds » : îles du Pacifique, Sahara Occidental, Océan Arctique, … Dans ces nombreuses paix tièdes, la guerre est avant tout médiatique. Les Etats-majors sont des cellules gouvernementales ; les armes sont les symboles ; les troupes deviennent les « opinions publiques ».
Dégageons trois types de symboles (et leurs combinaisons) :
– Le symbole diplomate : démontre la volonté pacifique d’un acteur. Symbole utilisé à travers l’histoire (lâchers de colombes, de ballons, …), utilisé par les USA (accord de Camp David, d’Oslo, désarmement atomique, …), prix (Nobel) il confère à l’acteur une force de persuasion diplomatique.
– Le symbole provocateur : transmet à l’ennemi une démonstration de la force de conviction non seulement du gouvernement (attroupement à la frontière revendiquée, rupture de dialogue, menace de veto, …) mais aussi de l’opinion publique nationale ou internationale, souvent manipulée, qui par ses manifestations prouve la force de la masse (des Chinois brûlant des drapeaux japonais, manifestations pro-catalanes ou basques, manifestations pro-Tibet, le récent lâcher de ballon depuis la Corée du Sud contre la Corée du Nord…). Son registre est essentiellement conflictuel.
– Le symbole de puissance : montre qu’un pays est un acteur incontournable. La course à la tour la plus grande du monde en est un excellent exemple. La course à l’espace en fut un durant la guerre froide. Ils permettent de transmettre un message subtil à son ennemi : le Pakistan vient par exemple d’entrer dans le Guinness Book pour avoir battu le record de chant de l’hymne national avec 42 813 chants simultanés, record anciennement détenu par … l’Inde avec 15 243 participants.
Ce maniement de symboles a trois fonctions : vecteur de puissance, il permet de passer au premier plan sur la scène internationale encombrée d’acteurs ; il a une fonction politique de remobilisation des opinions et d’unification nationale ; il permet enfin d’entrer dans la « guerre médiatique » pour toucher l’opinion publique internationale. Deux stratégies pour réussir : la stratégie de puissance afin de montrer ses gros bras ou une stratégie de victimisation pour émouvoir l’opinion internationale. Dans le conflit actuel sur les îles Senkaku/Diaoyu entre la Chine et le Japon, bien que les rôles réels soient bien plus complexes à définir, la Chine a opté pour la première et le Japon pour la seconde.
Les symboles revêtent ainsi des enjeux considérables pour analyser l’information géopolitique. Car derrière un symbole se cache toujours un message clair à l’encontre de son ennemi.